Warmup 2021 - 5ème édition

Thibaut Prigent, votre spectacle s’appelle La Fugue. Au sens de fuite, au sens musical ? Pouvez-vous le décrire ?

C’est un seul en scène. Et je n’aurais jamais pensé écrire un seul en scène de ma vie. Mais en fait, j’ai fait une formation d’un an et demi à l’atelier Cité, au théâtre national de Toulouse, et on pouvait à la fin de l’année présenter un solo. Là, en matière de texte, je n’ai pas trouvé grand-chose qui m’intéressait. J’ai donc commencé à improviser, à créer deux ou trois personnages. Je me suis filmé et quelques scènes sont sorties pour arriver en fin de formation à un spectacle d’une demi-heure.

Ça n’a plus grand-chose à voir avec La Fugue mais enfin, c’était là et, au fil du temps, du confinement aussi, il y a une histoire qui est arrivée. Un personnage a émergé qu’on va suivre tout au long de la pièce. Avec une quinzaine d’autres personnages que je joue.

Et le personnage central est donc...?

Stéphane, un malheureux vendeur de cuisines. Qui n’en peut plus de cette société, du monde de la vente, de la manipulation, de devoir vendre son corps pour vendre des cuisines... Il n’en peut plus mais c’est un peu inconscient. La pièce commence dans un rêve qu’il fait en pleine réunion de travail où il s’est endormi au milieu de ses collègues. Son patron lui pose une question sur la fameuse technique de vente à l’américaine alors que lui est en train de rêver qu’il est un super-héros, que les femmes le pourchassent... Et là, c’est le réveil et la catastrophe.

La catastrophe qui le conduit en hôpital psychiatrique...

Oui : il a un accident en sortant de la réunion et il devient amnésique. Il se réveille en hôpital psychiatrique. Il va y rencontrer des gens cassés par la vie, il va tomber amoureux aussi, d’une femme nommée Valentine. Et là il va tout faire pour repartir à zéro, pour récupérer meubles, argent. Tant et si bien que tous ensemble, avec les malades et avec Valentine, ils vont fuguer en minibus.

C’est une critique délibérée, assumée du consumérisme, du chacun pour soi ?

Complètement. Moi je suis acteur, mais même dans le théâtre, il y a ça. Cet état de domination constant, cette compétition qui commence à l’école avec le système des notes... Stéphane, mon personnage, se retrouve en plein là dedans. Dans sa fameuse réunion, il y en a un qui donne toujours la bonne réponse. Comme à l’école.

Alors je tire plutôt la critique vers la comédie parce que je pense que le message atteint plus rapidement l’inconscient : avec le rire, on s’ouvre...

Est-ce anecdotique de relever qu’en plus de votre formation de comédien, vous avez celle de menuisier

Tout en vous parlant, je suis en train de travailler pour monter une scène... Ma mère a eu la bonne idée de ne pas m’inscrire dans un lycée général parce qu’elle savait que ça n’irait pas : il fallait que je bouge. J’ai donc fait menuiserie - et théâtre à partir de 15 ans - et je bouge toujours pour apprendre mes textes.

Qu’allez-vous présenter lors de ce Warmup?

Je pense que ce sera la première partie : une demi-heure environ. Je pourrais le faire en entier : je vais le jouer au festival Coz Castel en Bretagne. Avec l’aide d’une cinquantaine de bénévoles et de quelques menuisiers, on y a monté une scène magnifique... Ce sera l’occasion de jouer La Fugue, en plein jour, avant d’attendre une création lumière à Toulouse. C’est un spectacle tout terrain.

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Propos recueillis par Jacky Vilacèque.

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